mardi 12 octobre 2010

Soleil et Lune : comment devenir immortel dans l'acte sexuel ?

Exister en société, apprendre sa différence

En société, chacun de nous doit apprendre son identité : naître riche ou pauvre, en ville où la campagne, au bord de la mer ou près d'une cime enneigée, homme ou femme. Cette identité sexuelle n'est pas une identité comme une autre.

Apprendre à être homme ou femme est un apprentissage conçu pour être l'apprentissage de toutes les différences, ainsi qu'une façon de "vivre sa différence". A une femme, on lui apprend, dans les sociétés dites "traditionnelles", à "tenir sa place". Par contre, à un homme, on lui apprend à déborder, à tenir de multiples places, à "investir une place" : cela va de la séduction à l'art de la guerre en passant la tromperie.

Cet apprentissage est d'autant plus efficace qu'il s'incarne dans le corps. A la façon dont son corps va s'adapter à des rituels sociaux, sera mesuré le degré de socialisation d'une personne. Mais aussi, selon la façon dont le corps sera autorisé à se déchainer, sera mesuré le degré de domination des hommes sur les femmes. A la guerre, le soldat est autorisé à piller, à violer, à incendier les maisons.

Pourquoi les techniques sexuelles ne sont pas des techniques sociales comme les autres ? Dans la sexualité, le corps est moins facilement socialisable. Pour qu'il y ait enfantement, donc plaisir, donc excitation, il faut que les corps permutent les places. Aussi dans le chevauchement, dans la montée de la jouissance, il y perte des repères simples des Identités Homme et Femme. Qui ordonne à l'autre ? qui est dépendant de l'autre ?

L'immortalité comme redistribution des différences

 Dans la culture chinoise ancienne, l'immortalité était selon un vecteur pour justifier la domination des hommes sur les femmes. L'immortalité sanctionnait la réussite masculine dans une technique de maîtrise de l'acte sexuel. Comment mieux prouver pour un homme la maîtrise de son énergie qu'en renonçant à l'orgasme et en le transfigurant en affermissement de son énergie vitale ?!

Le taoïsme propose une technique sexuelle d'atteinte de l'immortalité masculine et de la bonne santé féminine par la non excitation. Cette technique présente une double face. D'un coté, c'est une maîtrise du corps dans une optique juridique : le maître peut faire l'amour à toutes les femmes de la maisonnée en évitant de leur faire des enfants. La semence est réservée exclusivement aux femmes en titre : les enfants seront légitimes.

D'un autre coté, c'est dans la différence sexuelle, permettre à l'homme  d'ajouter l'énergie féminine à son énergie masculine. Alors que l'eau usuellement éteint le feu, cette technique  taoïste permet au Feu de l'homme de se raffermir au contact  de l'Eau immortelle de la femme. Paradoxe !

Beaucoup de sinologues disent que cette technique taoïste est également profitable à la femme, car elle reconnait à la femme le droit au plaisir. J'y opposerais cette remarque : pour gagner,  tout comme l'homme, l'immortalité, la femme doit renoncer à l'orgasme.

Dans l'extrait de l'ouvrage de Van Gulik dont je vais proposer ci-après la lecture, « La vie sexuelle dans la Chine ancienne », il est dit que la femme ne doit pas atteindre l'orgasme dans les termes suivants :
"La femme maîtrise ses émois et nourrit son esprit, de sorte qu'elle n'atteint pas le sommet (lien-houo-pou-tong, « le feu raffiné ne bouge pas »), elle fait descendre le k'i de ses deux seins dans ses reins, puis de là le fait remonter jusqu'à ce qu'il ait atteint le point ni-hoan. On appelle cela : « transformer le vrai » (hoa-tchen)."

En récompense de la maîtrise de ses émois, la femme y gagne l'esprit. Les féministes d'aujourd'hui ne manqueront pas d'ironiser !

A un premier niveau, le thème de l'immortalité substitue à la différence sexuelle une différence encore plus forte : être en vie / être mort. Le plus puissant, le Très Puissant sera celui qui dans la mort, qui d'entre-les-morts, se lèvera  face aux encore-vivants, et dira : "voyez, je suis mort, mais je vis !".  Est immortel celui qui abolit en lui la contrainte des différences sociales.

A un second niveau, la formule « transformer le vrai » (hoa-tchen) suggère que la femme possède déjà le vrai-de-l'immortalité. Par le fait même d'être une femme, la femme est immortelle. On reconnait là la transfiguration du pouvoir de faire des enfants, de se donner une descendance. C'est dire aussi que la femme est "avant" la différence homme-femme. La Mère donne naissance aussi bien à des filles qu'à des garçons.

Et l'homme, quel est son rapport à l'immortalité ? Au contraire de la femme, l'immortalité n'est pas acquise à l'homme. Il doit la construire. L'homme est Feu. Le Feu symbolise l'énergie virile, mais cette énergie ne possède qu'une "petite énergie d'immortalité". Non entretenu, le Feu s'éteint. Trop poussé, le Feu brule trop vite ses combustibles.

Rapporté au plan sociologique, cela équivaut à dire l'homme nomme la différence entre "Etre un homme" et "Etre une femme", et que cette différence doit toujours être réaffirmée ! Si la femme est Nature, l'homme est culture. Cependant en se nommant comme différent, en instaurant la Culture, l'homme perd, au plan symbolique, l'immortalité du cycle naturel de la renaissance.

Alors, dans la doctrine taoïste, face à la nécessité du rapport sexuel, l'homme est devant une alternative :
- dissiper son énergie dans la "production intense de chaleur" du rapport sexuel
- préserver et renforcer son énergie en évitant la dissipation externe de chaleur

La formule « le feu raffiné ne bouge pas » (lien-houo-pou-tong) indique que la participation féminine doit être sur le mode de la non-action. 

La doctrine est plus subtile. Le terme "raffiné" indique que le Feu de l'homme s'est propagé chez la femme : "il s'est raffiné". Autrement dit, toute l'excitation sexuelle de la femme viendrait de l'homme. Deux cas de figure :

1/ Plus la femme s'excite, plus elle consomme l'énergie virile. Et au moment de l'orgasme, le pic de consommation d'énergie virile est si élevé que l'homme est "vidé".

2/ La femme ne s'excite pas et mobilise sa propre énergie d'immortalité. Cette mobilisation d'énergie féminine bénéficie à la femme et indirectement à l'homme.

Comment l'énergie féminine se communique-t-elle à l'homme ? Il faut faire intervenir la très ancestrale thématique de la Lune et du Soleil, en mobilisant les équivalences :

- Homme = Feu = Soleil
- Femme = Eau = Lune


Nous lisons dans un site consacré au  Yoga :

"La Lune croit, décroît et disparaît. Cette périodicité sans fin consacre en elle l'astre des rythmes biologiques, du renouvellement, de l'éternel retour, car sa "mort" n'est jamais définitive mais suivie d'une résurrection. Ces différents aspects font d'elle un symbole de transformation et de croissance (croissant de lune), le symbole du passage d'un état à une nouvelle modalité d'existence.

La lune est une planète qui ne produit pas sa propre lumière, elle n'existe que par l'action éclairante du Soleil: de ce fait elle est symbole de dépendance car elle a besoin du soleil pour faire naître son reflet. Aussi de nombreuses traditions divinisent les deux grands luminaires et font de la Lune l'épouse du Soleil."

Qu'est-ce être homme ? C'est réussir sa mission : devenir immortel. C'est abolir l'excitation sexuelle, préserver et renforcer son Feu, rayonner sur la Femme et en retour recevoir une part de l'immortalité féminine, une part de l'énergie lunaire. On le verra dans l'extrait de texte que nous allons citer : l'homme immortel taoïste est surmonté de la figure des époux, Soleil et Lune.

Remarques sur la chasteté des religieux et la femme fatale

On trouve dans cette thématique taoïste bien des traits qui expliquent la recommandation de la chasteté pour les moines et les prêtres, ainsi que l'explication d'une Vierge qui enfante en l'absence de rapport sexuel.
- la Vierge qui enfante en l'absence de rapport sexuel symbolise l'énergie immortelle et lunaire de la femme
- la chasteté du moine ou du prêtre symbolise l'effort de l'homme pour mobiliser une fragile énergie solaire.

En arrière plan, il y a toujours ce trouble de l'homme dans l'inégalité entre les jouissances de l'homme et de la femme. Quand l'homme s'est vidé de son énergie, la femme dispose encore d'une réserve intacte d'énergie. La Femme fatale nomme ce destin de l'homme de n'être qu'une allumette consommée et vite consumée.

Préambule à une  technique taoïste du rapport sexuel

Découvrons ensemble, dans l'extrait de texte de Van Gulik la description de la technique de son A jusqu'à son Z. Cette description technique est intéressante car elle combine les quatre formes d'énergies symboliques que nous avons analysés précédemment :

- l'animisme : capter en soi l'énergie de l'autre, l'énergie du Féminin
- le réalisme : mobiliser ensemble des éléments hétérogènes, esprit, corps, énergie dans un système global
- le totémisme : tracer une ligne de "courant vital" dans le corps, selon un cercle qui s'épanouit au moment de son bouclage (ligne / fleur)
- l'analogisme : convoquer le macrocosme, ici les épousailles du Soleil et de la Lune

La technique du "retourner la semence"

Dans son ouvrage « la vie sexuelle dans la Chine ancienne », Robert Van Gulik évoque le conseil de SOEN Sse-mo, vivant sous la dynastie T’ang (618- 907), de « faire retourner la semence ». (Cf. les pages 252, 253, 254, Ed. Gallimard.)

«  ... SOEN Sse-mo déclare que le procédé par lequel on fait « retourner la semence » produit dans le cerveau une union des "principes masculin et féminin" - qu'on se représente en "évoquant l’image du soleil et de la lune". Autrement dit l'union sexuelle, si on l'opère de la manière voulue, rendra l'homme capable de réaliser une sorte d'hermaphrodisme spirituel et de devenir ensuite un immortel. ...

Un autre texte de l'époque T'ang décrit de façon instructive ce procédé par lequel on « fait retourner la semence ». Il nous est conservé par la biographie d'un adepte taoïste, P'EI Hsuan-jen, écrite par un certain TENG Yun-tze, que l'on trouve dans la section biographique du recueil taoïste Yun-ki-ts'i-ts'ien (éd. SPTK, vol. 27, chap. l05).

Du fait que ce passage est maladroitement écrit, et qu'il est hérissé de termes techniques taoïstes, je donne ici ma traduction sous toute réserve. Il commence par dire qu'il faut pratiquer le rite à une date prescrite, et après minuit; mais il ne faut pas que les partenaires aient bu de l'alcool, ni mangé d'une nourriture trop riche, car il peut en résulter un dommage au lieu d'un bienfait. Le texte continue ainsi :

Après s'être concentrés et avoir purifié leurs pensées, un homme et une femme peuvent alors pratiquer ensemble l'art qui conduit à la longévité. Cette méthode doit être gardée secrète, elle ne doit être transmise qu'à des adeptes. Elle permet à un homme et à une femme d'activer ensemble leur k'i 1, et à l'homme de nourrir sa semence (king) et à la femme son « « sang» (hsiue). Ceci n'est pas une méthode hétérodoxe (wai-fa), elle s'attache à activer le yin et à fortifier le yang.

Si cette discipline est mise en pratique de la façon correcte, alors le liquide k'i s'épandra comme nuages par tout le corps, la semence se solidifiera et deviendra harmonieuse, et bientôt tous ceux qui la pratiquent, qu'ils soient jeunes ou vieux, deviendront (vigoureux) comme des adolescents.

Les deux partenaires doivent commencer par méditer, par détacher leur esprit de leur propre corps et de toutes choses terrestres. Puis ils grincent des dents sept fois et récitent l'incantation que voici :
« Puisse l'Essence Dorée de l'Origine Blanche amener mes Cinq Fleurs à la vie; puisse le Seigneur Jaune du Centre harmoniser mon âme et régler mon essence; puisse l'Essence Suprême du Grand Empereur solidifier mes humeurs et fortifier mon esprit; puisse le Suprême Vrai In-surpassé lier mes six k'i ; puisse le Vieillard Mystérieux de l'Essence Suprême faire revenir l'esprit et fortifier ainsi le cerveau. Fais-nous nous unir, nous deux, et nous mêler, de sorte que l'embryon soit raffiné et le Trésor conservé ».

Ayant prononcé cette incantation, l'homme retient ses reins et enferme sa semence, de sorte que le k'i transmué monte le long de la colonne vertébrale jusqu'à ce qu'il atteigne le lieu ni-hoan dans le cerveau. C'est ce qu'on appelle « le faire revenir à l'origine » (hoan-yuan). La femme maîtrise ses émois et nourrit son esprit, de sorte qu'elle n'atteint pas le sommet ( « le feu raffiné ne bouge pas », lien-houo-pou-tong), elle fait descendre le k'i de ses deux seins dans ses reins, puis de là le fait remonter jusqu'à ce qu'il ait atteint le point ni-hoan. On appelle cela : « transformer le vrai » (hoa-tchen).

L'élixir (tan) ainsi formé (dans les corps des deux participants) s'il est nourri pendant cent jours, deviendra transcendant (ling). Et si l'on prolonge cette discipline sur une très longue période, alors il se fera habitude naturelle, méthode pour vivre longtemps et atteindre l'Immortalité.

Dans ce passage, l'étreinte sexuelle est conçue exclusivement comme un moyen de prolonger la vie; elle n'a pas pour but d'obtenir une descendance mais seulement de bénéficier également à l'un et l'autre participant. Ni l'homme ni la femme ne doivent atteindre à l'orgasme. L'acte est une sorte de processus alchimique, par où la semence de l'homme (king) et l'ovule de la femme (hsiue) sont éveillés, puis transmués en k'i lequel s'élève le long de la colonne vertébrale. Ce passage est l’un des rares où pareil processus est écrit en complète identité pour l'homme et pour la femme ; comme nous l'avons vu plus haut, les textes soulignent en général le bienfait que l'homme en retire, la femme n'en obtenant d'autre avantage que de remuer et activer son essence - yin.

Certains ouvrages médicaux de la dynastie Ming contiennent des images qui montrent le courant Vital à l’intérieur du corps de l’homme. Ce courant s’appelle « Courant Jaune », et l'action de faire monter la semence le long de ce courant se dit « faire couler le Courant Jaune dans la direction opposée » (hoang-ho-yi-lieo) ). On reproduit ici une des ces images, qui se trouve dans le traité Hsing-ming-koei-tche, de l’ époque Ming (..) Le courant y est représenté comme coulant normalement depuis le sommet de la tête, le long de la colonne vertébrale, jusqu'aux parties génitales. Dans la « technique inversée », la semence s'élève depuis les parties génitales, le long de la colonne vertébrale jusqu’à un point qui se trouve au sommet de la tête.

L’'image indique les étapes les plus importantes de ce cheminement.

"Le courant vital" reproduit d'après R. Van Gulik.

Premièrement, la semence atteint les reins, représentés par un demi-cercle ; selon la conception chinoise, les reins jouent un rôle Important dans la vie sexuelle de l'homme et de la femme. L'entrée des reins s'appelle yeo-k'iue, « le portail sombre », et la sortie mi-ou, la « porte secrète ».

Vis-à-vis des reins, sur le devant du corps, le nombril est indiqué ; au-dessous sont le le ming-men, la « porte au destin », et le cheng-men, la « porte de vie », c’est-à-dire la prostate et les vésicules séminales. La partie de la colonne vertébrale qui se situe au dessus des reins s'appelle wou t'ang-koan, « la porte des cinq salles ». Plus haut, trois nerfs vont jusqu'au cœur. Puis le courant traverse le soei-hai, la « mer de moelle » c'est-à-dire, la partie arrière du cerveau, qui parvient à l’endroit ni-hoan, zénith de la force vitale au sommet de la tête.

Dans le même ouvrage, d’autres images dépeignent l’adepte qui a fait rebrousser chemin à la semence : un soleil et une lune apparaissent sur le sommet de sa tête. »

Une influence venue d'Inde ?

D'où vient cette combinaison du retour du retour de la semence avec l'union du Soleil et de la Lune ?

Une recherche sur Google met en avant un article expliquant la symbolique Soleil et Lune présente au sein des postures inversées, article écrit par Elizabeth Libraire dans la Revue Française de Yoga, n°2, "Postures inversées", 1990, pp. 19-34.

Les principes du Yoga ont été mis au point en Inde au moins 1000 ans av. J.C. Je me permets de citer longuement ce texte afin que le lecteur puisse en comparer les termes avec la technique sexuelle présentée ci-dessus, et identifier certaines correspondances.

« Soleil et lune représentent respectivement le principe masculin et le principe féminin. Ils sont la polarité basique, Shiva-Agni, du Hatha Yoga, complémentaires dans leur destruction créatrice. L’efficacité de leur interaction est d’autant plus radicale que la posture est inversée. Cela nous rappelle que le yoga n’est pas purement corporel, ses symboles sont essentiels.

Toute l'ambroisie qui s'écoule de la Lune à la divine beauté est, sans en rien excepter, dévorée par le Soleil et c'est pour cela que le corps est sujet à la décrépitude".

Ce texte tiré de la Hatha-Yoga Pradipika (111,77) et relatif à l'attitude inversée (viparita karani) met en valeur la symbolique de la Lune (Chandra) et du Soleil (Surya), symbolique omniprésente dans l'ensemble du traité et fondamentale pour la compréhension du Hatha- Yoga en général et des postures inversées en particulier. […]

La pratique de l'attitude inversée fait partie des nombreuses techniques décrites dans les textes et destinées à favoriser l'union du Soleil et de la Lune. Quel est le contenu symbolique de ces deux astres? Quelle est la nature de cette union? Par quel processus la position inversée du corps accélère-t-elle l'évolution vers l'unification? En un mot comment décoder ce langage symbolique? […]

La lune est une planète qui ne produit pas sa propre lumière, elle n'existe que par l'action éclairante du Soleil: de ce fait elle est symbole de dépendance car elle a besoin du soleil pour faire naître son reflet. Aussi de nombreuses traditions divinisent les deux grands luminaires et font de la Lune l'épouse du Soleil.

La Lune croit, décroît et disparaît. Cette périodicité sans fin consacre en elle l'astre des rythmes biologiques, du renouvellement, de l'éternel retour, car sa "mort" n'est jamais définitive mais suivie d'une résurrection. Ces différents aspects font d'elle un symbole de transformation et de croissance (croissant de lune), le symbole du passage d'un état à une nouvelle modalité d'existence.

Liée à l'eau, la Lune est productrice de pluie. De ce fait, elle devient source et symbole de fécondité et représente le principe féminin, l'archétype maternel par excellence que l'on associe fréquemment à la coupe, réceptacle des eaux primordiales ainsi que des germes de vie.

Astre de la nuit, elfe évoque aussi la beauté de la lumière dans l'immensité ténébreuse. Beauté devient alors synonyme de clarté donc de Connaissance. Mais il s'agit là d'une connaissance indirecte (puisque la lumière de la Lune n'est que le reflet de celle du Soleil), théorique, discursive et froide.

Passive et réceptive, elle représente une polarité "yin" par rapport au Soleil qui est "yang". Elle est l'eau par rapport au feu solaire, le froid par rapport à la chaleur, le nord et l'hiver symboliques opposés au Sud et à l'été, etc...

La Lune évoque encore les valeurs nocturnes, donc le rêve, l'inconscient, l'imaginaire. […]
Le symbolisme du Soleil est lié à celui du Feu. Dans le sujet qui nous préoccupe ici, lis Soleil (Sûrya) et le Feu (Agni) sont étroitement associés, voir même confondus. If s'agit là de deux symboles "clé" sur lesquels s'appuient la plupart des mythologies et qui se caractérisent par une très forte ambivalence puisque l'un et l'autre participent à la création et à la destruction de la matière. […]

Ill - L'AMBROISIE

Revenons maintenant à Chandra, la Lune qui orne le front de Shiva et contient le Soma, appelé aussi amrita, que l'on traduit par nectar lunaire, ou ambroisie.

Soma (ou amrita) est un breuvage extrait d'une plante encore mal déterminée -probablement le jus d'un champignon hallucinogène - que les prêtres utilisaient pour les cérémonies et les sacrifices à l'époque védique. A l'origine, cet élixir appartenait aux dieux, mais l'aigle Gandharva en fit don aux mortels, afin qu'ils le servent en offrande aux Dieux et qu'ils puissent communier avec le divin en l'absorbant de manière rituelle, déclenchant ainsi une extase momentanée. […]

Cette boisson divine était particulièrement prisée du Dieu Indra, souvent associé au Feu, Agni comme nous l'avons vu précédemment.

Transposé à l'échelle de l'homme microcosmique, ce nectar est localisé symboliquement dans la cavité au-dessus du palais et rend l'homme invulnérable et immortel. […]

Chez l'homme ordinaire, le Soma s'égoutte continuellement depuis la cavité palatale pour être consumé par le feu gastrique qui en est particulièrement avide. L'objectif du hatha-yogi consiste à préserver ce nectar, à limiter son écoulement ou à le stopper et nombreuses sont les techniques proposées par les shastra pour aller dans ce sens. […]

Le nectar lunaire, l'ambroisie divine représente le potentiel vital et psychique de l'homme. C'est une sorte de réserve d'énergie particulièrement utile dans le processus de transformation de l'adepte. C'est là qu'il puise la motivation et la force nécessaires pour assumer les différentes étapes de son évolution, cette évolution étant caractérisée par la purification progressive de tous ses niveaux d'être (physique, énergétique, émotionnel, intellectuel) qui s'accomplit grâce au Feu. Au terme de cette démarche longue et ardue qui nécessite l'assistance d'un guru et grâce notamment aux pratiques qui permettent d'"économiser" le Soma, le yogi évite la décrépitude et atteint à l'Immortalité.

Cette immortalité ne concerne pas le corps physique, encore que ces pratiques, lorsqu'elles sont appliquées dans des conditions adéquates, peuvent aider à maintenir le corps dans des conditions de vitalité optimales et ralentir le processus du vieillissement.

Le mot d'immortalité signifie que l'adepte, au terme de celte ascèse, atteint un degré de purification telle qu'il transcende tous les plans de son être (physique, énergétique, émotionnel, mental), qu'il découvre la Réalité Ultime qui l'habite et que l'on appelle Atman, Brahma, ou encore Parasita. Celle Réalité possède les qualités de Pure Conscience, de Totale Béatitude et d'Immortalité. Le yogi qui réalise cette phase ultime de son évolution est alors libéré du Karma et de l'enchaînement au cycle sans fin des réincarnations (samsâra).

Dans la tradition Hatha-yogique, l'adepte arrivé au terme de son évolution et qui réalise cet état de Pure Conscience, Totale Béatitude, au delà du temps, réalise en même temps le but ultime indiqué par les shastra: l'union du Soleil et de la Lune. […]

D'un point de vue énergétique (l'énergie étant comprise ici dans sa dimension physique mais également psychique), l'inversion du corps associée à la pratique des bandha permet l'activation du feu gastrique, cette source d'énergie fondamentale à partir de laquelle s'effectue la purification progressive du corps et de ses différentes enveloppes.

En effet, au-delà du corps grossier et de son enveloppe physique (sthula sharira et annamaya kosha liés à muladhara chakra), l'action purificatrice d'Agni va s'exercer sur le corps subtil (sukshma sharira) et les enveloppes qui le constituent: pranamaya kosha, l'enveloppe faite d'énergie et de vitalité, reliée à svadhisthana et manipura chakra, manomaya kosha qui correspond au mental et à ses implications sur notre nature émotionnelle, en liaison avec anahata chakra, vijnanamaya kosha, l'enveloppe faite d'intelligence objective qui nous permet d'appréhender la réalité sans émotion, avec une parfaite ouverture du coeur et de la conscience grâce à la purification de vishuddha et ajna chakra.

Lorsque tous ces niveaux d'être (physique, émotionnel, mental) sont transcendés, l'étape ultime peut intervenir : il s'agit de l'accès au Soi et la découverte de la totale Béatitude (Sat-Cit-Ananda) qui requiert de la part de l'adepte un niveau de parfaite pureté. »

Mouvements de Yoga au printemps pour renouveler son énergie : de la salutation au soleil à la posture inversée

Technique :
Quand le corps est engourdi fatigué ou ralenti par les froids mois d'hiver, et que l'énergie montante du printemps nous incite à sortir de notre coquille, la pratique des postures de yoga sur un rythme un peu plus soutenu que d'habitude, assortie de respirations puissantes du type Bastrika ou Kapalabhati, vont nous aider à renaître symboliquement et énergétiquement à la vie nouvelle qui s'annonce.

La lymphe, le sang, les organes digestifs (foie, vésicule, reins, colon) et le système nerveux parasympathique (chargé de la conservation et de la restauration de l'énergie de l'organisme après une réponse du système nerveux sympathique au stress.) sont les acteurs majeurs de notre nettoyage intérieur par l'élimination des toxines. C'est pourquoi il est nécessaire de les stimuler et de les revitaliser maintenant.

Voici une Salutation au Soleil augmentée de quelques postures qui vont favoriser l'étirement, la compression et la circulation dans ces organes et systèmes pour améliorer notre adaptation à la saison et à l'environnement.

On commence par quelques cycles de la Salutation habituelle sur un rythme soutenu, pour augmenter la chaleur du corps et la circulation de l'énergie. La respiration Ujayi (légèrement freinée) est longue et intense pendant toute la séance, sauf pour les postures de fin, en détente.

Puis on reprend l'enchaînement des postures sur un rythme plus lent, en ajoutant des postures spécifiques maintenues le temps de 3 à 5 respirations, et on termine par une ou deux torsion au sol et une relaxation en posture inversée soutenue, les jambes contre le mur : viparita karani.

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